Avr 12

Révocation dans la police : les juges sont sévères !

Tags:

La Cour administrative d’appel de Paris (arrêt 16PA00359 du 14 mars 2017) a infirmé un jugement rendu par le Tribunal administratif de Melun qui avait annulé l’arrêté ministériel prononçant la révocation d’un gardien de la paix, en raison de son caractère disproportionné.

Le contrôle des sanctions disciplinaires infligées aux agents de la police nationale

Comme tout fonctionnaire de l’Etat, les agents de la police nationale sont soumis aux dispositions des lois des 13 juillet 1983[1] et du 11 janvier 1984[2]. La faute du fonctionnaire expose celui-ci à une sanction disciplinaire. Les sanctions sont classées en quatre groupes, allant de l’avertissement (1er groupe) à la révocation (4ème groupe).

L’appréciation de la gravité de la faute de l’agent de police est donc apprécié par rapport aux devoirs spécifiques qui s’imposent à eux : devoirs d’intégrité, de dignité et d’exemplarité[3].

La sanction disciplinaire peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Traditionnellement ce dernier exerçait un contrôle restreint sur les sanctions disciplinaires. Seules les sanctions entachées d’une erreur manifeste d’appréciation étaient censurées. Son contrôle s’est intensifié depuis le célèbre revirement de jurisprudence opéré par le Conseil d’Etat dans son arrêt Dahan du 13 novembre 2013[4]. Désormais, le juge opère un véritable contrôle de proportionnalité de la sanction disciplinaire.

Des circonstances atténuantes balayées par les juges d’appel

En l’espèce, la requérante était gardien de la paix. Elle avait fait l’objet d’une révocation pour avoir dérobé quatre flacons de parfums dans un magasin.

En première instance, les juges avaient retenu que la sanction de révocation était disproportionnée. Ils relevaient notamment que les faits ont été commis en tenue civile, hors du service et sans recours aux moyens du service, et qu’aucune poursuite pénale n’a été engagée. Sur la personnalité du fonctionnaire, il relève une situation personnelle et financière difficile à la suite d’un congé de longue maladie. Surtout, ils soulignaient qu’au moment des faits, le requérante était sous traitement psychotrope assez lourd, qui certes, n’avaient pas eu pour effet d’abolir son discernement mais avait pu contribuer à perturber son jugement et à lui faire perdre conscience de la gravité des actes auxquels elle se livrait.

La Cour administrative d’appel ne l’a pas vu de la même manière. Elle constate simplement que les certificats médicaux n’établissent pas une abolition du discernement. Ce faisant, la juridiction d’appel est indifférente à la question de savoir si l’état psychologique et le traitement suivi par la fonctionnaire a pu ou non altérer le discernement sur la gravité de ses actes.

Quel avenir pour les sanctions disciplinaires dans la police?

Cette décision ne traduit pas seulement une sévérité dans l’appréciation du caractère proportionnée d’une sanction disciplinaire. En refusant de prendre en compte ce qui a pu altérer le discernement et la conscience de la gravité des actes commis, la décision de la Cour administrative d’appel opère un discret retour à un contrôle restreint de la sanction disciplinaire. On se demande dès lors dans quelle hypothèse la révocation pourrait à l’avenir revêtir un caractère disproportionné.

Pour voir la décision, cliquez sur ce lien.

[1] Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983

[2] Loi n° 84-16 du 11 janvier 1984

[3] Décrets

[4] CE 13 novembre 2013, Dahan, n° 1347704